
Résumé
Cette thèse de doctorat traite de l’espace dédié au culte des divinités shintō dans la spatialité nipponne. Pour les Japonais les kami sont partout, depuis le hameau le plus isolé jusqu’aux quartiers les plus densément peuplés, et même jusqu’aux toits des buildings des quartiers d’affaire. L’espace de ces myriades de kami est intimement intriqué dans tous les aspects de la vie des Japonais, et nous tentons de déterminer les conditions de cette omniprésence.
Une partie de la réponse se trouve dans la définition même du terme jinja. Traduit communément par « sanctuaire shintō », il désigne plus largement une multiplicité de formes spatiales : des objets naturels tels qu’un arbre ou un rocher considérés comme sacrés, aux aménagements et dispositifs les plus simples et les plus primitifs, jusqu’aux formes construites les plus élaborées et les plus monumentales. Ensuite, nous questionnons la manière dont s’articule l’espace du sanctuaire avec son site, rural ou urbanisé. Nous tentons de démontrer que les dispositifs de délimitation de l’enceinte du sanctuaire artitulent des zones où plus justement des tranches d’espace, qui mènent graduellement du profane vers le sacré à mesure que l’on approche du kami. Ces limites sont en réalité poreuses : elles font s’interpénétrer espace profane et espace sacré. Ainsi, l’enceinte du sanctuaire invite aussi des activités autres que cultuelles, comme des évènements festifs ou marchands. Enfin, nous traitons des rituels shintō dans la spatialité japonaise, ainsi que la temporalité de ces rituels qui jalonnent l’année au rythme des grandes dates du calendrier agraire, notamment les rituels d’accueil des kami à la période des semailles au printemps, et de renvoi après les moissons à la fin de l’automne. A ces dates cruciales, les processions battent son plein partout dans l’archipel, même en milieu urbanisé.
Dans une approche transdisciplinaire, ce travail de recherche se place dans le domaine de l’architecture et de l’anthropologie spatiale. Nous nous basons sur des ouvrages théoriques en langues occidentales et en langue japonaise, ainsi que sur nos observations ethnographiques de rituels dans différents sanctuaires de Kyōto, ainsi qu’Ise jingū et Izumo taisha.